Après le stade de la reconstitution du Dan Tian Inférieur, et de l'agrégation du qi en son Centre (hua chi), il est temps d'appliquer différentes opérations à l'énergie ainsi concentrée. Parmi celles-ci, le raffinement de l'énergie est essentiel. Raffinement veut dire modification de l'essence et de la nature de l'énergie en un état de pureté supérieur. L'énergie rassemblée dans le Dan Tian inférieur par les pratiques précédentes est essentiellement de l'énergie issue de l'alimentation (gu qi), de la respiration (ta qi), et de l’essence énergétique issue des organes sexuels, c'est à dire des énergies acquises après la naissance, ou énergies du Ciel Postérieur. Raffiner l'énergie consiste à la transformer en énergie pure du Ciel Antérieur. Dans le corps, l'énergie innée du Ciel Antérieur se divise en Yuan qi, Jing qi et Zong qi. Pour raffiner l'énergie acquise, la première étape consiste à mettre en circulation l'énergie du Dan Tian inférieur et de la relier à ces énergies innées, concentrées en certains lieux du corps, puis de la ramener dans le Dan Tian Inférieur. Le point Ming Men, sur le méridien extraordinaire Du mai, est lié au Yuan qi, lequel circule dans les méridiens extraordinaires et particulièrement dans Tchong mai, connecté à Du mai au périnée. Le point Shan Zhong, sur Ren mai, est lié à l'énergie ancestrale ou Zong qi. Pour mettre en circulation l'énergie du Dan T'ian inférieur, on se sert de la respiration dite inversée, ou contraire. Cette méthode respiratoire est utilisée pour pratiquer la Petite Révolution Céleste (xiao zhou tien), technique du premier niveau de raffinement de l’énergie.
Le procédé physique de la respiration inversée est assez simple, s'appuyant essentiellement sur la mobilisation du diaphragme et la bascule du bassin. Il faut d’abord placer la pointe de la langue au contact du palais, au-dessus de la racine des deux incisives supérieures. Mais la mise en circulation et la conduite du souffle forment un procédé un peu plus difficile, nécessitant la conjonction de la respiration, de l'attention, de l'écoute interne, de l'intention dirigée et de l'imagination représentative en un seul état de concentration paisible et détendue.
Pendant l'inspiration le ventre est rentré doucement, le diaphragme montant jusqu'à ressentir l'expansion interne dans la poitrine atteindre le niveau des clavicules, c'est à dire le haut du tronc. Le diaphragme forme alors une voûte. Le bassin a basculé vers l'avant, le pubis descendant et l'anus remontant. Pendant l'expiration, le diaphragme est doucement repoussé vers le bas, le ventre sortant légèrement en avant. A mesure que le diaphragme repousse vers le bas du tronc le bassin bascule, le point Ming Men entre les reins glissant vers le sol pendant que le petit bassin semble se tourner vers le haut. Les muscles contrôlant les orifices inférieurs (sphincter et urètre) sont légèrement contractés tout au long de l'expir, afin que le souffle ne s'échappe pas. Tout l'air n'est pas expulsé lors de l'expiration, les poumons ne sont pas complètement vidés. L'inspir dure environ 6 secondes et l'expir environ 9 secondes. A la fin de l'expiration, un temps de suspension d'environ 7 secondes est observé avant un nouvel inspir.
Pour ce qui est du mental et des perceptions, à l’étape précédente du rassemblement du souffle dans le Dan Tian inférieur, on se représentait le Centre de Cinabre Inférieur comme un foyer, un petit soleil ou encore une perle brillante, condensés de la vapeur vitale lumineuse qui emplissait le ventre à l’inspiration. A chacun de trouver ce qui lui est le plus facile à visualiser, à se représenter, mais cela doit de toute façon être lié à une perception physique précise du Dan T'ian et de son énergie, formés par la pratique précédente. Maintenant il s'agit de se représenter le Champ de Cinabre comme une roue ou une sphère, emplie de l'énergie émanant de son centre, d’une sorte de vapeur gazeuse chaude, dynamique, lumineuse. On imagine alors que la roue se met à tourner dans un sens pendant l'inspir (comme une roue d'une bicyclette qui avance), puis dans le sens contraire pendant l'expir (comme une roue d'une bicyclette qui recule). L'image de la bicyclette est d'ailleurs assez exacte car, pendant l'inspiration, c'est un peu comme si l'on actionnait mentalement des pédales pour faire tourner le plateau dans un sens et, pendant l'expiration, comme si on inversait le mouvement pour pédaler en sens contraire. Mais ici, c'est seulement le mental, la volonté, l'intention concentrée, qui font tourner le Champ de Cinabre, il faut donc imaginer le mouvement et se le représenter intérieurement, jusqu'à ce que la visualisation devienne une réelle perception dans le ventre et tout au long du circuit.
Il s'agit maintenant de conduire l'énergie du Champ tout au long du méridien Du Mai pendant l'inspir, puis de l'y ramener par le méridien Ren Mai pendant l'expir. Pour cela, tout en inspirant doucement, on imagine un flux de vapeur lumineuse partir de la roue en mouvement pour descendre droit au périnée, passer sous le bassin et remonter le long de la colonne vertébrale, jusqu'au point Bai Hui. Quand on s'est représenté le souffle arrivé au point Bai Hui, on inverse mentalement le mouvement de rotation du Champ Inférieur, de la roue d'énergie, tout en expirant, et l'on se représente le flux redescendant le long du méridien Ren Mai pour revenir se déverser au centre.
La montée du souffle s'accompagne de la contraction du périnée que l’on tire vers le haut et de la montée du diaphragme. Mais la poitrine n'est cependant pas volontairement bombée et les épaules, le cou et la nuque restent détendus. La descente du souffle s'accompagne de la pression douce du diaphragme vers le bas, et de la bascule inverse du bassin, mais la sensation de compression dans le bas du tronc ne doit pas être exagérée, et le ventre devenir dur. Celui-ci au contraire, ainsi que le tour de taille, doivent rester relaxés, souples.
Les trajets de Du Mai et de Ren Mai sont assez simples à connaître et à visualiser, ils suivent les axes dorsal et facial du tronc, mais certains points doivent être précisés quant au cheminement précis du flux. Lors de l'inspiration, le flux est guidé par l'intention concentrée depuis le Champ Inférieur à travers le bas de l'abdomen directement vers le point Chang Qiang (Du 1), jonction entre le sacrum et le coccyx. Il suit ensuite l'axe du tronc pour tourner sous le bassin et remonter vers les reins. Il atteint alors (seuls les points importants sont indiqués) le point Yao Yang Guan (Du 3 – Passe lombaire du yang), entre la 4ème et la 5ème lombaire, puis continue de monter jusqu'au point Ming Men (Du 4), entre les 2ème et 3ème lombaires. Continuant son ascension, le souffle atteint ensuite les points Zhi Yang (Du 9 – extrémité du yang), puis Taï Ling, Shen Dao (Du 11), sous la 5ème dorsale, Da Zhui (Du 14) entre la 7ème cervicale et la 1ère dorsale, et enfin Ya Men (Du 15), à la base du crâne, entre les 1ère et 2ème cervicales. De là il monte le long de l'arrière du crâne pour finir par atteindre Bai Hui (Du 20). Il n'est point absolument nécessaire d'apprendre les locations, les noms et qualités de ces différents points, l'essentiel étant de savoir qu'ils correspondent à des lieux de transformation ou de distribution de l'énergie ascendante.
- Les Trois Passes Postérieures:
Le pratiquant qui s'entraîne à la Petite Révolution Céleste après avoir réalisé la reconstitution de l'énergie du Champ Inférieur peut assez vite ressentir le flux d'énergie obéir à son intention et commencer son ascension le long du méridien Du Mai. A trois endroits entre le bas du dos et la nuque, il est cependant possible de percevoir que la sensation du flux ascendant s'arrête, comme s'il rencontrait un obstacle. Ces obstacles sont appelées les Trois Passes postérieures et correspondent à autant de portes à franchir affin que le souffle puisse atteindre des lieux de transformation mais aussi d'imprégnation. Les trois passes postérieures sont dans le coccyx, à la base de la colonne vertébrale, puis au milieu du dos, là où les côtes joignent la colonne vertébrale, et enfin à l'arrière du cerveau. Le premier arrêt dans l'ascension du souffle est souvent ressenti dés la remontée du flux vers les reins, empêchant alors le souffle d'atteindre Ming Men, dépositaire d'une part du Yuan Qi inné. La passe est dans le coccyx, au fond de la colonne vertébrale, et est reliée avec les canaux des organes génitaux. De cette passe monte aussi la moelle épinière qui est appelée la Rivière Jaune, ou la Voie de la Roue à Eau, ou l'Échelle jusqu'au Ciel. C'est la route par laquelle l'énergie yang monte pour atteindre dans le dos le point opposé à celui nommé Centre de la Poitrine, au niveau où les côtes joignent la colonne vertébrale, deuxième passe. Ensuite le souffle monte tout droit jusqu'à l'arrière du cerveau, au lieu appelé la Passe du Coussin de Jade. Il y a plusieurs causes aux difficultés que l'on peut ressentir à faire franchir ces passes à l'énergie ascendante. D'abord cela peut être tout simplement l'effet d'une mauvaise posture, engendrant un mauvais placement du bassin, un mauvais alignement des vertèbres et un maintien incorrect de la tête. Ensuite cela peut provenir d'une détente insuffisante des muscles, des organes, du cœur par émotivité et du mental par un manque de concentration. Enfin cela peut aussi provenir de la dispersion du qi à ces niveaux de connexions avec les reins, le cœur et les poumons, souvent effet d'une insuffisance importante dans l'énergie de ces organes, des méridiens ou des Champs de Cinabre liés. Dans tous les cas il convient cependant de poursuivre l'intention et la représentation et de continuer à conduire mentalement le flux jusqu'au sommet du crâne. Si le flux ne passe pas le sacrum et n'atteint pas Ming Men, reprendre aux débuts des séances la respiration ventrale jusqu'à sentir le souffle emplir suffisamment le Champ Inférieur puis pratiquer la Petite Révolution Céleste. Si le souffle ne franchit pas la seconde passe et n'atteint pas Ling Taï, apaiser le coeur et les émotions parasites et augmenter l'intention, la volonté. Si le souffle ne passe pas la troisième passe, vider l'esprit de toute peur ou désir, conduire doucement le flux de lumière jusqu'au Coussin de Jade comme pour entrer avec prudence dans une caverne obscure. Arrivé à ce point il est alors facile de faire monter le souffle jusqu'à Bai Hui.
La difficulté de la Petite Circulation Céleste est surtout dans l'ascension du souffle. Ramener le souffle le long du méridien Ren Mai ne pose pas de grandes difficultés mais doit cependant être opéré avec autant d'attention et de concentration.
- Les Trois Passes Antérieures :
Les trois passes antérieures sont appelées le Centre de Vacuité, le Chaudron Terrestre, et l'Océan de Souffle.
En pratique, depuis le point Bai Hui le flux est conduit le long de l'axe du visage jusqu'au point Yin Jiao (Du 28), sous la lèvre supérieure, puis il passe par la langue pour descendre au point Lian Quan (Ren 23). De là il descend au point Tian Tu (Ren 22), puis au point Zhong Ting (Ren 17 – Palais Central), puis au nombril d'où il rentre s'enrouler dans le Dan T'ian Inférieur.
Les femmes font partir le souffle du cœur par le point Zhong Ting, en poussant d'abord un peu le diaphragme vers le bas (et en fermant en même temps les orifices inférieurs du corps) au début de l'inspir. Puis le diaphragme remonte et le ventre se creuse quand le souffle remonte dans le dos jusqu'au sommet du crâne. A l'expir le diaphragme est relâché et la région du plexus légèrement creusée.
L'énergie de l'homme débute à Tae yang, elle nait de l'Eau, dans la fonction Chen, les reins, et son dynamisme est dans le Champ de Cinabre Inférieur, celle des femmes débute à Shao yin, elle naît du Feu Ministre, dans la fonction Sin et le cœur, et son dynamisme est dans le Champ de Cinabre Médian.
Certaines zones de concentration de l'énergie sont dites Wei Dan Tian, ou Champ de Cinabre externes, sont incluent celui du sommet du crane, au point Bai Hui, le central au point Chong Ting (Palais Ecarlate), celui du bas à Hui Yin (Réunion des Yin - périnée), les Dan Tian arrière à Ming Men et Ling Tai, ceux des mains à Lao Gong et des pieds à Yong Chuan. À part les mains et les pieds tous les autres Dan Tian sont localisés le long de Du mai et de Ren mai, ou méridien gouverneur et méridien de conception. Mais on trouve encore un autre Dan Tian interne, nommé Huang Ting (Palais Jaune). Le Palais Jaune est situé derrière le point Guan Yuan (Ren 4).
Le Centre de Vacuité est le vrai Champ de Cinabre Supérieur. C'est une ouverture sphérique de 1.3 pouces de diamètre, qui est le lieu où repose l'esprit. Cette ouverture est trois pouces derrière le point central entre les sourcils. L'espace entre les sourcils est appelé l'Œil Céleste. L'espace situé un pouce plus à l'intérieur est appelé la Salle de la Clarté Intérieure. L'espace un pouce plus loin est appelé la Chambre Cachée. Un pouce plus loin que la Chambre cachée est le Centre de Vacuité. Parmi les noms que les taoïstes lui donnent, en voici quelques-uns : "Caverne de la Conscience Originelle" "Palace de Cristal" "Trône de la Clairvoyance" "Passe Mystérieuse" "Cavité de l'Esprit".
L'ouverture ombilicale est appelée la Porte de Vie. Il y a sept canaux connectés qui la relient avec les organes génitaux. Sous le nombril et devant les reins, droit au milieu, est le lieu nommé le Chaudron du Croissant de Lune, ou Océan d'Énergie (Qi Haï). Et 1.3 pouces au-dessous est ce qui est appelé l'Étang de la Fleur - Hua Qi, ou vrai Champ de Cinabre Inférieur (Zheng Dan Tian). C'est le lieu où la vitalité est entreposée.
Après avoir réalisé la Petite Révolution Céleste et l’avoir pratiqué un certain temps, les organes et entrailles, les orifices supérieurs et inférieurs, et les fonctions en rapport doivent être sans faiblesses ni dommages. La vitalité est accrue, les cinq sens clairs, et l’esprit calme. La descente du souffle dans le Dan Tian Inférieur s’accompagne souvent de spasmes dans cette zone, les yeux sont brillants et les paumes des mains chaudes. L’excitation sexuelle s’accroit chez les hommes, la séduction chez les femmes et tous deux doivent alors fermement contrôler ces pulsions. Il est temps alors de pratiquer la troisième étape du travail sur l’énergie interne, la Grande Révolution Céleste.
Si possible on s’assoit dans la posture dite du lotus, ou en demi lotus. Les mains sont posées sur les genoux, paumes vers le haut. La procédure respiratoire est la même que pour la Petite Révolution Céleste ainsi que les techniques de bascule du bassin et de fermetures des orifices inférieurs pendant l’expiration. On visualise de même la rotation de la sphère d’énergie dans le bassin, laquelle peut être perçue plus ample qu’auparavant, avec en son centre l’énergie condensée du Hua qi.
A l’inspiration on déplace le souffle du point Yong Chuan (Source Bouillonnante) de la plante du pied vers le talon puis la face externe des jambes jusqu’au point Ming Men où il suit alors le méridien Du mai jusqu’au sommet du crâne (point Ba Hui). De là, tout en expirant, on le conduit par Ren mai comme pour la Petite Révolution Céleste au point Qi Hai, puis à Hui Yin au périnée, puis en suivant la face interne des jambes aux points Yong Chuan de la plante des pieds.
L’inspiration prend environ 9 secondes, l’expiration 12 secondes, puis on observe un temps de rétention d’environ 15 secondes. La plante des pieds comme les paumes des mains doivent être réchauffées quand le souffle vital circule correctement, le cœur doit rester calme, une légère sueur peut apparaitre au haut du crâne.
Par la Grande Révolution Céleste l'organisme entier est empli de l'énergie vitale. Les 12 méridiens réguliers Tching et les 8 méridiens irréguliers Mai sont irrigués et la relation entre l'énergie interne et l'externe est améliorée par les points de connexion que sont Ba Hui au sommet du crâne, Yong Chuan à la plante des pieds et Lao Gong dans la paume des mains.